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13 mai 2011 5 13 /05 /mai /2011 07:00

Henry Peach Robinson

 

She never told her love


Robinson_She_never_told

 
She never told her love est avant tout une étude pour Fading away : Henry Peach Robinson combinait en effet, le plus souvent, plusieurs négatifs.
Mais le titre fait également référence à une réplique de Viola dans La nuit des rois de Shakespeare :

" She never told her love, but let concealment, like a worm 'i th' bud, feed on her damask cheek. She pinned in thought; and, with a green and yellow melancholy, she sat like Patience on a monument, smiling at grief. Was not this love indeed ? "
Traduction :  "Jamais elle n'avoua son amour, elle en laissa le secret, comme le ver dans le bourgeon, ronger le rose de ses joues. Elle languit dans sa pensée ; jaunie, verdie par la mélancolie, elle s'inclina, comme la Résignation sur une tombe, souriant à la douleur. N'était-ce pas là de l'amour ?"






Fading away

 

Robinson - Fading away

 
Fading away représente une jeune fille atteinte de tuberculose sur son lit de mort : un sujet violent et douloureux que le public de l'époque, guère habitué à ce genre de choses, a mal supporté, malgré la virtuosité qu'on a reconnu alors à Henry Peach Robinson. Aujourd'hui, on associe au contraire l'aspect morbide de ce cliché à une forme de grande poèsie.

 

 

 

The Lady of Shalott

 

Peach Robinson - The Lady of Shalott

 
Sujet influencé par l'Ophélie de Millais, mais tiré d'un célèbre poème de Tennyson, et traité plusieurs fois par Waterhouse dans des toiles non moins célèbres.
En résumé, la Dame de Shalott est victime d'une malédiction qui lui interdit de regarder le monde autrement que par le truchement d'un miroir. Voyant le reflet de Lancelot se rendant à Camelot, elle passe outre l'interdiction ; son miroir se brise (c'est le fameux "The mirror crack'd from side to side") et elle est condamnée à mourir, se laissant aller au fil de l'eau sur un bateau en direction de Camelot.
Là encore, Henry Peach Robinson a utilisé plusieurs négatifs pour créer cette image de la Dame de Shalott.




Voir aussi :
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (1)
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (2)

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11 mai 2011 3 11 /05 /mai /2011 07:00

 

John Everett Millais

 

La fille du bûcheron
(1850-1851)


Millais - La fille du bûcheron

Le sujet est tiré d'un poème de Coventry Patmore, The woodman's daughter. Millais s'en est servi pour traiter du thème de la prostitution (on voit ici le garçon "corrompre" pour la première fois la fillette en lui offrant des fraises), mais il me semble, à la lecture du poème, que le sujet initial est un peu différent ; cela dit, je l'ai lu en anglais et pas mal de choses m'ont échappé. De toute façon, que Maud, la fille du bûcheron, accorde ses faveurs pour de l'argent au bout de quelques années ou qu'elle soit violée, elle tombe enceinte, noie son enfant et sombre dans la folie (désolée, ça n'est pas très gai). Il y a du Tess d'Uberville dans cette histoire...
Ce qui n'est pas visible sur cette image, c'est le flou du regard de la fillette (et je parle de flou au sens propre du terme, et au non au sens figuré). La déformation, très frappante, que Millais a appliquée au corps du garçon à des fins expressives, et qu'on ne trouve pas dans des oeuvres comme Ophélie ou Marianna, était déjà présente dans d'autres tableaux, notamment dans Isabella (sa première oeuvre préraphaélite) via le personnage de Lorenzo.





Un Huguenot le jour de la Saint-Bathélémy, refusant malgré les efforts de son amante de se protéger en portant le foulard blanc du parti catholique
(1851-1852)


Millais - Un Huguenot

Le titre est suffisamment éloquent pour que je n'en fasse pas des tonnes sur le sujet. Le thème est tiré d'un opéra de Giacomo Meyerbeer (je ne sais pas qui c'est...).
La présence du mur accentue le sentiment de fatalité qui pèse sur les deux personnages, encore renforcé par la fleur tombée à leurs pieds (mais, encore une fois, pas vraiment visible ici, parce que l'image est tronquée dans le bas).




Voir aussi :
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (1)
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (3)

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9 mai 2011 1 09 /05 /mai /2011 07:00

 

Dodgson - Amy Hughes (03)

 

 

Il est bien dommage qu'Une ballade d'amour et de mort ait été programmée (en partie du moins) pendant la rétrospective Manet, car elle en souffre visiblement.La plupart des gens ne font qu'y passer distraitement, lisent rarement les textes d'introduction, encore moins les cartels, et, s'ils accordent un peu d'attention aux œuvres picturales, ne jettent q'un bref regard aux clichés photographiques. Ce qui, en revanche, est un avantage certain pour les autres visiteurs, qui peuvent profiter de cette exposition à loisir, tout en riant sous cape d'imaginer les foules entassées dans les salles de l'autre côté du musée (situation qui me rappelle un récent article sur le blog Louvre-passion à propos de Nature et idéal – Le paysage à Rome). Et pour une fois que l'on ne cherche pas à nous appâter avec un titre racoleur présentant de près ou de loin un rapport avec l'impressionnisme, ce serait idiot de ne pas en profiter !

D'autant que cette exposition traitant des rapports entre la photographie britannique de la seconde moitié du XIXème siècle et la peinture préraphaélite est plutôt réussie dans l'ensemble, d'une part, et qu'elle présente des œuvres, picturales ou photographiques, qu'on n'a pas si souvent l'occasion de voir en France, d'autre part (je pense en particulier à celles de Rossetti, Millais et Peach Robinson, même si le musée d'Orsay possède une superbe photographie de ce dernier). Les influences que chacune a pu exercer sur l'autre, les références et les thèmes communs, les buts parfois identiques que toutes deux se proposent d'atteindre sont assez clairement exposés et l'aller-retour entre les deux assez aisé pour le visiteur. Un bémol, cependant, sur les deux premières parties qui concernent "l'œil ruskinien" (c'est-à-dire une nouvelle approche des sujets et de la nature) et le traitement du paysage.

Il me semble qu'il n'est pas toujours très évident de comprendre, au XXIème siècle, en quoi la photographie de paysage et la peinture préraphaélite constituaient un bouleversement dans l'art et dans la société du XIXème siècle en Grande-Bretagne, bouleversement qui saute d'autant moins aux yeux des Français que nous sommes. En effet, les premières images qui nous viennent en général à l'esprit lorsqu'il est question du préraphaélisme (quand il nous en vient), sont plus ou moins apparentées au Moyen-âge et à la légende arthurienne, voire à Shakespeare. C'est d'ailleurs, à mon avis, ce qui fait la bonne fortune des reproductions des œuvres préraphaélites. Or, un des autres aspects fondamentalement novateurs du mouvement, beaucoup moins mis en avant - et qu'on retrouve dans la photographie de paysage - se rapporte à une démarche nouvelle en matière de représentation de la nature. Les peintres préraphaélites ont choisi d'aller peindre en plein air, de peindre ce qu'ils voyaient, et, si nous avons le sentiment qu'il n'y a rien là de bien neuf, tout blasés et gonflés d'importance que nous sommes parce que notre pays a donné naissance à l'impressionnisme, nous nous trompons lourdement. Mais non, au XIXème siècle, - attention, grosse révélation à venir - les impressionnistes n'ont pas eu le monopole de la peinture en extérieur, pas plus qu'ils ne l'ont inventée (ce qui ne veut pas dire non plus que les préraphaélites aient été les premiers à l'avoir pratiquée). Toujours est-il que les préraphaélites se sont énormément attachés à cet aspect de leur art, tout comme les photographes paysagistes ; de ce point de vue, la végétation dans l'Ophélie de Millais (qui n'apparaît pas dans l'exposition) est tout à fait exemplaire.


Par conséquent, je pense qu'il n'aurait pas été inutile d'accrocher quelques œuvres "académiques" de l'époque, pour faciliter la comparaison (comparaison qui, pour le coup, est dans l'exposition impossible) et démontrer noir sur blanc (c'est le cas de le dire) en quoi photographes et peintres préraphaélites bousculaient la tradition. D'autant plus que ce que j'avance concernant notre approche de la peinture préraphaélite est encore plus valable pour la photographie ; tous les clichés qu'on nous donne à voir dans ces premières salles sont, pour l'œil contemporain et à première vue, de banales photographies de paysage – exception faite, peut-être, pour un cliché de Henry White intitulé Fougères et ronces, et dont le dégradé des teintes est étonnant ; encore faut-il avoir envie de s'arrêter devant (après tout, ce ne sont que des fougères en photo), et, donc, avoir saisi l'intérêt de photographier des fougères à l'époque (j'ai comme l'impression que mon article prend un tour assez prétentieux, comme si je laissais entendre que personne n'a compris l'intérêt de cette partie de l'exposition, sauf moi. Ce qui n'est pas du tout ce que je voulais dire, en fait. Bon, tant pis si j'ai l'air de me la jouer, vous ferez avec). Mais cette exposition relevant d'abord d'un projet britannique, l'opposition entre peinture victorienne, d'une part, et peinture préraphaélite et photographie, d'autre part, est peut-être plus évidente pour un public lui-même britannique. J'ajouterai que les photographies de paysage sont peut-être légèrement trop nombreuses, vu que, une fois que l'on a compris l'intérêt de la chose, on a moyennement envie de regarder des paysages à la file. Cela dit, j'ai été véritablement étonnée et charmée de découvrir avec quel luxe de détails les sujets des épreuves sur papier albuminé tirées de négatifs au collodion (ah ah, notez ma parfaite maîtrise du jargon technique) étaient représentés.

 

Fenton - Abbaye de Bolton fenêtre Ouest

 


Dans les salles suivantes, place au portrait, à la mythologie et la littérature, et enfin à la représentation de la vie moderne. Bien que Julia Margaret Cameron soit particulièrement mise en avant dans cette partie de l'exposition, et s'il est incontestable qu'elle a joué un rôle fondamental dans l'élévation de la photographie au rang d'art (ses mises au point, très particulières pour l'époque, ont alors défrayé la chronique), je me lasse assez vite de ses portraits de jeunes filles dans des poses alanguies, toutes arborant un air triste ou rêveur (ou les deux à la fois), avec un recours à une mise au point volontairement floue beaucoup trop systématique à mon goût. J'émets d'ailleurs en gros les mêmes réserves à propos de Rossetti, que je n'apprécie pas tellement. Les deux partageaient d'ailleurs d'assez grandes lacunes en matière de technique ; lacunes à cause desquelles les clichés de Cameron ont pâli et se sont mal conservés et qui ont abouti à la disparition d'une fresque de Rossetti. Côté portraits, j'ai donc, entre autres,  largement préféré ceux de Dodgson (alias Lewis Carroll), admirablement mis en scène, à ceux plus ou moins éthérés de Cameron. Notons aussi la présence d'une  série de portraits de Jane Morris par John Robert Parsons, sous la direction de Rossetti, dont certains  méritent vraiment qu'on s'y attarde (mais pas tous, à mon avis. Quelques uns manquent singulièrement d'intérêt, je me demande bien ce que Rossetti avait en tête). Côté "mythologie" et vie moderne, Ce sont Henry Peach Robinson et Oscar Rejlander qui m'ont tapé dans l'œil. Le premier, pour ses clichés recomposés qui sont emplies d'une grande théâtralité et baignant souvent dans une ambiance un peu morbide (je ne me lasserai jamais de Fading away et She never told her love) ; le second, en grande partie à cause d'une photographie qui s'intitule Homeless et qui traite des conditions de vie des enfants des rues - sujet qui commençait alors à préoccuper la Grande-Bretagne - de façon tout à fait poignante. Enfin, mention spéciale aux deux tableaux de John Millais présents dans l'exposition, La fille du bûcheron, qui traite de la prostitution et dont l'héroïne arbore un regard étrangement flou (un flou pictural, technique, à la Cameron, si j'ose dire) et Un Huguenot, le jour de la Saint-Barthélemy ; tous deux dégagent une tristesse et un sentiment de fatalité intenses, associés à un traitement incomparable des couleurs. On regrettera évidemment l'absence d'Ophélie et de Mariana, qui auraient eu toute leur place ici. Une petite esquisse de Mariana figure cependant aux côtés de photographies de Cameron et Peach Robinson traitant du même thème (tiré de Mesure pour mesure de Shakespeare), celui d'une jeune fille lasse d'attendre son fiancé.

Un bémol tout de même concernant cette charmante Ballade d'amour et de mort : les textes, mal écrits, sont bourrés d'incorrections et de fautes de grammaire. Voilà qui gâche quelque peu le plaisir de la visite. Pas très classe, de plus, pour un musée comme Orsay…

 

Rejlander - Homeless



Voir aussi :
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (2)
Une ballade d'amour et de mort - Musée d'Orsay, Paris (3)

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4 mai 2011 3 04 /05 /mai /2011 07:00

Jeune bambiraptor
Libellule
Reconstitution d'un récif de rudistes

 

 


Bambiraptor

Drôle de nom pour un dinosaure, qui se trouvait pourtant être un redoutable prédateur (remarquez ses griffes en forme de faucille) ! En fait, il doit son nom au petit garçon qui l'a découvert. Bambiraptor faisait partie des droméosaures, des dinosaures à plumes, dont l'ancêtre est aussi celui des oiseaux.

 



Libellule

Ce fossile d'une fascinante précision est celui d'une libellule de très bonne taille. Je ne dispose pas des dimensions exactes, mais, d'après mes souvenirs, elle faisait bien dans les 15-20 cm d'envergure.


 


Reconstitution d'un récif à rudistes

C'est ici la reconstitution d'un fond sous-marin. Les rudistes étaient des mollusques marins, assez proches des huîtres et des moules.

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2 mai 2011 1 02 /05 /mai /2011 07:00

 

Carnotaurus


 Les dinosaures sont à la science ce que l'impressionnisme est aux Beaux-arts. Collez le mot "dinosaures" dans n'importe quel titre d'exposition, et vous êtes sûrs de faire recette : la foule accourt en masse. Je me compte bien entendu dans ladite foule ; soyez bien certains que si l'exposition, au lieu de s'intituler Dans l'ombre des dinosaures, s'était présentée sous l'appellation La crise Crétacé-Tertiaire, ou sous n'importe quelle autre formule plus directement en lien avec le sujet, mais moins aguicheuse, je ne m'y serais pas rendue. Mais l'esprit humain étant ce qu'il est, c'est-à-dire bien faible, j'ai succombé, comme tant d'autres, à la tentation – bien compréhensible, cela dit – de contempler les traces de la grandeur et de la décadence du genre dinosauresque.

Donc, si l'on peut effectivement contempler quelques squelettes de dinosaures fossilisés (ce que ne manque pas de nous rappeler le musée), qui sont d'ailleurs, d'un point de vue scénographique, le clou (et aussi le point de départ) de l'exposition, celle-ci s'est donné comme sujet principal le tournant Crétacé-Tertiaire, à savoir une immense crise écologique qu'a connue la Terre il y a environ 65/70 millions d'années ; crise que l'on nomme KT, de l'allemand "Kreide Tertiär". Ce qui n'est donc pas, finalement, sans rapport avec les dinosaures, puisque ceux-ci ont justement disparu, ainsi que de nombreuses autres espèces, il y aurait 70 millions d'années. Et qui nous ramène assez tristement à notre actualité (sommes-nous à la veille d'une autre grande crise écologique ?).

L'exposition se présente donc en trois parties, qui sont : l'époque des dinosaures (de -85 à -70 millions d'années), la crise proprement dite du KT (de – 70 à -65 millions d'années) et les théories actuelles sur les causes de cette crise, et enfin la vie et l'évolution des survivants au Tertiaire (de -65 à -40 millions d'années). On fait donc d'abord connaissance avec quelques dinosaures habituellement beaucoup moins mis en vedette que le T-Rex, ainsi qu'avec des mammifères, des insectes et de curieux êtres sous-marins (dont une impressionnante Ammonite géante), par le biais de fossiles. La suite évoque les deux grandes théories sur le KT (qui ne s'excluent d'ailleurs pas l'une l'autre). La première, largement médiatisée, c'est évidemment celle de la météorite qui aurait percuté la Terre ; cette théorie doit son origine à la découverte d'un taux anormalement élevé d'iridium (métal très rare sur Terre) dans une couche argileuse datant du KT.  La seconde théorie, peut-être moins connue, a été motivée par l'étude des traps du Dekkan en Inde, ces formations basaltiques issues de gigantesques coulées de lave : l'hypothèse est donc celle d'un phénomène de volcanisme géant. Enfin, les dernières salles font la part belle à ceux qui sont nommés le "cortège des disparus", de façon un peu macabre (alors que cette partie de l'exposition ne l'est pas du tout, loin s'en faut). On y rencontre de nombreuses espèces de mammifères qui, pour ne plus exister aujourd'hui, ne nous en rappellent pas moins certains de nos compagnons terriens. Et, surtout, on nous explique comment ces différentes espèces ont évolué, se sont adaptées, voire spécialisées dans certains domaines (courir, nager, grimper, la liste est longue). Intéressant, par exemple, de voir que les siréniens (dont font partie, aujourd'hui, les lamantins), qui avaient quitté l'océan, sont devenus amphibies et se sont retrouvés avec quatre pattes, avant de retourner définitivement à l'élément marin sous un aspect et munis de capacités différents.

C'est une exposition clairement familiale, émaillée d'outils interactifs, de courtes vidéos, avec des textes explicatifs plus spécifiquement adressés aux adolescents et aux adultes, à la fois compréhensible par tous et qui réactive ou apporte un certain nombre de connaissances pour les non-initiés, sans pour autant saturer le cerveau. Bref, une exposition utile et agréable, à la portée de tous.

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29 avril 2011 5 29 /04 /avril /2011 07:30

Mon lit

 

Othoniel - Mon lit (1)





Othoniel - Mon lit (2)





Othoniel - Mon lit (3)

 



Les photos auraient pu être meilleures, mais je les ai prises vite fait et en catimini, après avoir remarqué que d'autres ne se privaient pas. Je voulais être discrète ; je ne me suis rendue compte que tardivement que les gardiens se fichaient comme d'une guigne qu'on prenne des photos.

 

 

Voir aussi les articles suivants :
Jean-Michel Othoniel - My way - Musée national d'art moderne, Paris (1)
Jean-Michel Othoniel - My way - Musée national d'art moderne, Paris (2) - Photos

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27 avril 2011 3 27 /04 /avril /2011 07:00
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25 avril 2011 1 25 /04 /avril /2011 07:02

 

Othoniel - My way

 


Difficile (voire périlleux) exercice pour moi que de commenter une exposition d'art contemporain. Mais bon, que je sois particulièrement inspirée aujourd'hui, ou particulièrement inconsciente (vous ferez votre choix), je me lance sur le travail de Jean-Michel Othoniel, en tentant un semblant d'argumentation. Sans quoi ça n'aurait pas vraiment d'intérêt (déjà que...). Je vais donc éviter de m'arrêter sur l'aspect esthétiques des choses, sous peine de vous ennuyer avec un "C'est très joli" concernant les oeuvres en verre de Murano et un silence dubitatif face aux oeuvres à base de soufre.

Rétrospective qui ne m'a pas convaincue plus que ça (ah ben oui, ça commence mal). Outre que je suis arrivée au Centre Pompidou d'une humeur massacrante - c'est peu de le dire - et donc guère propice à un état d'esprit ouvert et curieux, j'ai trouvé dans l'ensemble qu'on avait affaire à du déjà vu, tout au moins sur les thèmes énoncés par l'artiste, à savoir les matériaux voués au rebut qu'on réhabilite, le corps fragmenté, les blessures et les cicatrices, la question du genre (masculin/féminin), et j'en passe. Mais, vous savez comme moi qu'en art comme en littérature (qui est davantage ma partie), on utilise les mêmes thèmes encore et toujours depuis la nuit des temps, et que c'est le traitement du thème qui est susceptible de nous intéresser plus que le thème lui-même. Je vous parle cependant d'un artiste qui a dit : "La beauté n'existe pas sans sa part d'ombre. Si on veut parler du beau, il faut aussi parler du grotesque, des monstres, de la violence." Vous avouerez que, dans le genre poncif, ça se pose là... Et s'il faut absolument nommer un artiste qui aurait donné dans les grotesque, les monstres et la violence bien avant Othoniel, je dirais au hasard, voyons... mmhhh... Ben tiens, Goya (il me semble que ce n'est pas un mauvais exemple) ! De plus, j'avais vu l'expo Odilon Redon juste avant de me rendre à la rétrospective Othoniel (très mauvais timing, il faut bien le dire), qui donnait lui aussi pas mal dans le genre monstrueux. Bref, vous m'avez comprise.

La première partie de l'exposition concerne les "insuccès photographiques". Donc là, je vous propose carrément d'aller voir sur un autre blog si vous trouvez mieux, tellement ça m'est passé au-dessus de la tête (je vous ai déjà dit que je n'étais en forme en entrant dans l'expo. Mais l'aurais-je été que... Bref). J'aurais bien eu besoin d'un médiateur à ce moment-là (quoique... vous comprendrez  plus loin). Je vais donc vous citer le petit document d'aide à la visite, d'ailleurs plutôt bien fait (enfin là c'est un mauvais exemple) et carrément utile : "Photographies où les corps sont réduits à de simples halos bleutés, minuscules installations d'objets qu'on devine symboliques, variations de lumières et d'ombres autour de la question du dévoilement : la délicatesse des matériaux rappelle la fragilité de l'existence. [...] L'artiste, fasciné par l'inabouti, les images et les expérience ratées, ancre ses recherches dans l'informe et l'innommable". Mmmmhh, c'est tellement inattendu (je ne vois pas d'autre mot) que ça donne carrément envie d'aller voir la suite...

La suite, c'est donc le soufre, le corps fragmenté et la question du genre. Le document d'aide à la visite est très explicite en ce qui concerne le choix par Jean-Michel Othoniel du soufre comme matériau ; et comme je suis tombée sur un conférencier traitant justement le sujet du soufre chez Othoniel devant un groupe d'enfants âgés d'environ 8-10 ans, je me suis dit "Quelle chance, je vais écouter ce qu'il raconte, et vu l'âge des participants, son discours sera tout à fait adapté à mes besoins". Je vais donc reprendre à peu près mot pour mot ce qu'il a dit (rappelez-vous : public de 8-10 ans) : "Le soufre était autrefois utilisé en bas des maisons et des immeubles pour repousser les chiens. Utiliser ce matériau laissé en souffrance, ça faisait sens pour Jean-Michel Othoniel". Alors, peut-être ai-je été une enfant particulièrement attardée, mais j'avoue qu'à 10 ans, je ne connaissais pas le sens des expressions "en souffrance" et "faire sens". Ou peut-être les enfants d'aujourd'hui bénéficient-ils d'un vocabulaire particulièrement riche. Ou peut-être encore le conférencier s'adressait-il à des précoces... Toujours est-il que, si moi j'ai bien compris le sens de l'intervention, ça ne m'a rien appris, puisque j'avais lu la même chose sur le document écrit. Et en ce qui concerne le fond, le coup de donner une nouvelle vie et un nouveau sens à un matériau voué au rebut, comme je l'écrivais en début d'article, je trouve ça usé jusqu'à la corde. Même chose pour le corps fragmenté et l'érotisation de parties du corps non sexuées, qui consitue quand même un basique de la psychanalyse. Quant à la question du genre, le plus significatif est peut-être la sculpture d'un Hermaphrodite en soufre (je crois) et de couleur jaune (qui rappelle celui exposé au Louvre, d'ailleurs, par sa position), qui présente des coquilles d'escargots à la place des parties génitales et qui, selon Othoniel, "évoque une disparition plutôt qu'elle ne représente un corps". Mouais. Là non plus, rien de très neuf.

Jusque là, vous me direz que je ne me suis pas montrée des plus enthousiastes (ce qui n'est pas faux). Donc, je vais amorcer un léger tournant et me montrer très peu originale en avouant que, comme quasiment tout le monde, j'ai été beaucoup plus intéressée  et emballée par les installations en verre de Murano. D'une part parce que le côté esthétique de ces oeuvres-là est forcément plus alléchant pour le visiteur lambda, d'autre part parce qu'elles sont plus accessibles : elles sont explicitement issues d'un univers poétique lié à l'enfance et c'est là le genre de chose qui parle à tout le monde. Mon lit, pour prendre l'une des oeuvres les plus connues mais aussi la plus éloquente, représente un (très grand) lit de princesse entouré d'une sorte de toile végétale (fabriquée en métal, en fait, mais qui m'évoque un organisme végétal), dont on ne sait si elle est en train de se déchirer ou si, au contraire, est en pleine expansion et finira par emprisonner complètement le lit. Enfin, la démarche d'Othoniel qui consiste à demander aux artisans qui fabriquent les boules de verre de les blesser volontairement, c'est-à-dire de les rendre irrégulières, me semblait un peu plus intéressante que le reste. Je cite : "Le verrier m'avait expliqué que la chose la plus difficile était de ne pas laisser de trace dans la matière, si l'on blesse la boule quand elle est en fusion, cette blessure va toujours réapparaître. Cette idée me plaisait beaucoup : que malgré tout le travail d'embellissement, la blessure réapparaisse." Il m'a semblé que ce thème des  blessures qui répparaissent encore et toujours faisait particulièrement sens (argh, je parle comme un conférencier) dans une oeuvre qui s'intitule Les amants suspendus et où on peut voir justement les blessures anciennes de l'un et l'autre qui ressortent, mais aussi, peut-être, celles qu'ils s'infligent l'un à l'autre et  l'aspect "sur le fil" de l'amour et du couple (je ne sais pas si je me fais bien comprendre).

Je passe sur la dernière partie de l'exposition, consacrée plus ou moins aux modélisations mathématiques. Arrivée là, j'étais vraiment fatiguée et je ne m'y suis pas franchement intéressée. Je note tout de même que, dans cette exposition où les photos sont logiquement interdites, les gardiens sont extrêmement indulgents (d'ailleurs, à ce point, ce n'est même plus de l'indulgence) ; l'anti-musée d'Orsay, en somme !

 

 

Othoniel - Les amants suspendus (1)



Othoniel - Les amants suspendus (2)

 

 

 

Voir aussi les articles suivants :
Jean-Michel Othoniel - My way - Musée national d'art moderne, Paris (2) - Photos
Jean-Michel Othoniel - My way - Musée national d'art moderne, Paris (3) - Photos

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22 avril 2011 5 22 /04 /avril /2011 07:00

Petite anecdote en lien avec l'exposition Manet du  Musée d'Orsay

 

Alors voilà. Un jour d'avril, j'arrive comme une fleur au musée d'Orsay, en pleine exposition Manet, avec l'intention d'aller voir Une ballade d'amour et de mort (expo sur les préraphaélites et la photographie). Il se trouve qu'en général, je ne paye pas l'entrée dans les musées nationaux (et donc pas l'entrée pour le musée d'Orsay), ainsi que dans la plupart des expositions (ce que j'apprécie fort, au demeurant). Mais je ne fais pas pour autant partie des personnes munies de billets coupe-file et autres laissez-passer. Donc se pose pour moi régulièrement la question, concernant les expositions en particulier, de savoir si je dois passer par les caisses ou non, si je dois prendre ma place dans telle file d'attente ou dans une autre. Par exemple, pour la rétrospective Odilon Redon au Grand Palais, l'agent d'accueil m'a aimablement laisser entrer avec les "coupe-file" (il est vrai qu'il n'y avait pas beaucoup de monde, car c'était à l'ouverture) ; mais je me suis rendue compte, avec le recul et, surtout, forte de ma pénible expérience au Musée d'Orsay, qu'il m'avait fait une très gentille fleur.

Donc, pour aller voir Une ballade d'amour et de mort, et sachant que j'étais entrée récemment sans encombre (et, surtout, sans file d'attente) à la rétrospective sur Gérôme, je ne m'étais pas trop inquiétée. Ce qui est d'une naïveté incroyable de ma part : il était évident que l'exposition Manet allait générer beaucoup plus d'entrées, donc beaucoup plus d'attente. Mais j'étais – presque -persuadée (quelle idiote, quand j'y pense) que le musée d'Orsay était suffisamment bien organisé pour ne pas mélanger les personnes venues spécialement pour Manet et les autres – c'est-à-dire les gens venus voir l'expo sur les préraphaélites, celle sur Mahler, ou bien encore (après tout, pourquoi pas ?) les collections permanentes. Résultat : grosse grosse désillusion.

A 14h30 environ, il y avait une bonne file d'attente – ce qui était prévisible - pour accéder à la porte A (traduction : le porte pour le visiteur lambda). Cette porte donnant visiblement accès aux caisses, je me disais que, avec de la chance, je n'aurais pas à passer par là. Je vais donc m'enquérir de la démarche à suivre dans mon cas particulier auprès d'un agent d'accueil, qui, très aimablement, et ne sachant pas me répondre, me conseille d'aller poser ma question à son collègue officiant devant l'autre file d'attente (celle des "coupe-file" ; je ne sais pas si je suis bien claire), celle qui mène à la porte C (et qui permet de ne pas passer en caisse). Le personnage en question était beaucoup moins aimable… Je demande poliment si, étant donné mon cas, je dois attendre dans la file pour la porte A. Il réfléchit (ou fait semblant de réfléchir) quelques secondes, puis me répond : "Oui". Bon. Je lui demande s'il en est sûr (il avait l'air d'avoir répondu au hasard, en fait), en lui précisant que je n'ai pas besoin de passer en caisse. Là, il me répond : "La liste est là", en me désignant du menton un panneau indiquant quel genre de public avait le droit d'accéder à la porte C. Effectivement, je ne correspondais pas aux exigences indiquées sur ledit panneau.

Dépitée, je me retourne vers les vitres du musée, où je vois inscrit en gros "Bénéficiaires de la gratuité – Porte C". Ah ça mais ! Etant justement bénéficiaire de la gratuité, la logique voulait donc que je passe par la porte C. D'un autre côté, la liste inscrite sur le panneau indiquait bien que je ne pouvais pas accéder à la porte C. Que fallait-il en penser ? J'étais toute perplexité quand une nouvelle information vint parasiter encore davantage mon cerveau : c'était un panneau indiquant "Exposition Manet – Porte A". Bon, bon, bon. Est-ce que ça voulait dire que l'accès à la porte A n'était réservée qu'aux personnes venues voir l'exposition Manet et devant passer en caisse ? Et donc que les autres visiteurs pouvaient passer par la porte C ? Peut-être suis-je un peu lente d'esprit (à ma décharge, je précise qu'il faisait assez chaud, ce jour-là, et que la chaleur limite mes ressources cognitives), mais tout ça était tout de même de nature relativement contradictoire. Je vais donc m'assurer auprès de l'agent d'accueil de la file d'attente pour la porte C que l'accès à la porte A n'est pas réservée à l'exposition Manet - plus pour le côté intellectuel de la chose que dans l'espoir d'entrer avec les coupe-file. Là, il prend un air terriblement excédé, lève les yeux au ciel et grogne quelque chose du genre "Grmmmmbbbblgrmmmbbbbllllgrrrmmmbbbl", et qui voulait sans aucun doute dire "Fichez-moi la paix, espèce de folle". Bon.

Au point où j'en étais, j'avais encore moins envie d'attendre, sous le soleil cinglant, dans la file pour la porte A qu'au moment où j'étais arrivée. J'étais fatiguée. J'avais soif. J'en avais assez du musée d'Orsay avant même d'avoir passé la porte (oui, mais laquelle, au fait ?). J'allais repartir pour d'autres horizons quand j'ai avisé le premier agent d'accueil que j'avais rencontré – celui qui était aimable (ce qui n'est pas si courant à Orsay) – j'aurais dû le demander en mariage, cet homme est une perle, en fait. Je lui dis que j'ai bien compris que je dois passer par la porte A, mais que tout ça n'est pas très clair et que son collègue n'a pas vraiment pris la peine de m'expliquer le pourquoi du comment. Eh bien figurez-vous que pendant que je m'emmerdais avec le stupide agent de la porte C, celui de la porte A était allé se renseigner sur mon cas. Et m'a donc finalement expliqué, ainsi qu'à un étudiant à qui se posait le même problème qu'à moi  et qui venait de me rejoindre,  que le musée d'Orsay n'ayant pas prévu d'ouvrir une entrée spécifique en cas de grosse exposition (et donc de public beaucoup plus nombreux) , les visiteurs se divisaient en deux files : ceux qu'il a appelés les "passe-droit", et tous les autres, qu'ils soient venus pour l'exposition ou pas. C'est bien la preuve d'un grand sens de l'organisation de la part de la direction du musée, mais ce qui m'a exaspérée encore davantage, c'est que l'agent d'accueil de la porte C, à qui ça aurait pris trente secondes de m'expliquer ça, a préférer se montrer désagréable et grogner.

Bref, je suis finalement allée au Centre Pompidou, où je n'avais pas mis les pieds depuis… eh bien, disons, depuis un certain temps. Mais comme j'ai dû marcher sous la chaleur jusqu'à la station de métro Palais-Royal et que cet imbécile d'agent d'accueil m'avait énervée et fait perdre du temps, je suis arrivée d'assez mauvaise humeur (ce qui explique que j'étais dans un état d'esprit assez moyen à la rétrospective Othoniel : cf. Jean-Michel Othoniel - My way - Musée national d'art moderne, Paris (1) ). Mon lit, avec son côté conte de fée et retour à l'enfance, m'a quand même sortie de ma bouderie. Et Dieu merci, il y a quelque chose qui a un effet plutôt lénifiant sur l'esprit au Centre Pompidou : c'est Kandinsky. Vous pouvez vous asseoir sur un banc (certes, pas très confortable) devant Accent en rose et rêvasser tout à loisir (même si, c'est bien dommage, on ne peut pas s'affaler comme devant les Sabines de David au Louvre), ça vous remet des émotions – négatives – générées par Orsay et une partie de son personnel.

 

Kandinsky - Accent en rose

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23 mars 2011 3 23 /03 /mars /2011 07:00

 

Messerschmidt - Vieillard (01)

 

C'est une chose que de s'arrêter pour regarder une  représentation scupltée de la douleur à l'état pur, c'en est une autre de devoir supporter la vue de toute une série de ce type de représentations. Et forcément, les  nombreux portraits de Messerschmidt - qui furent appelés "Têtes de caractère" après sa mort, mais que lui-même nommait simplement "Kopfstücke" - rassemblés en une même exposition, laissent un goût amer. Il faut dire que ces véritables  métaphores de la souffrance (et de l'aliénation mentale) sont assorties d'une parfaite maîtrise technique (Messerschmidt était un très bon praticien, tant dans le domaine de la fonte que dans celui de la ciselure à froid) et d'un grand réalisme de la forme, qui les rendent tout particulièrement frappantes.


On sait peu de choses sur Messerschmidt, puisqu'il s'est peu confié et n'a pas laissé d'écrits. Encore aujourdh'ui, les historiens de l'art s'appuient sur un des euls témoignages qui nous soient parvenus, celui de Friedrich Nicolai, un homme de lettres allemand qui rencontra Messerchmidt. Nicolai rapporta entre autres que le sculpteur se disait hanté, malmené par ce qu'il appelait "l'esprit des proportions", qui s'amusait à le torturer parce jaloux d'une découverte primordiale que lui-même, Messerchmidt, avait faite concernant les proportions... Pour chasser cet esprit malfaisant, Messerchmidt expliquait donc qu'il s'appliquait à se pincer de certaines façons en faisant des grimaces devant son miroir, et à en reproduire les effets par le biais de la sculpture : ce qui donnait vie aux fameuses "Têtes de caractères". Ces portraits (qui sont donc des autopotraits au sens figuré, mais qui ne le sont peut-être pas au sens littéral) avaient donc un but "thérapeutique", ce qui explique d'ailleurs qu'ils soient restés dans la sphère du privé et n'aient jamais été vendus ou exposés par le sculpteur de son vivant. On peut ajouter que deux des têtes grimaçantes de Messerchmidt (dont l'une a disparu et l'autre se trouve au Belvédère de Vienne) représentent, elles, un visage déformé au point que la bouche donne l'impression d'être un bec : il s'agit probablement de représentations de "l'esprit des proportions".


Une chose est particulièrement notable dans ces sculptures : c'est que presque toutes les têtes ont les lèvres serrées, pincées, voire rentrées ; elles sont même scellées par une bandelette dans quelques (rares) portraits. Certains y ont vu une relation avec les travaux de Mesmer sur le traitement des maladies psychosomatiques à l'aide d'aimants (Mesmer et Messerschmidt se connaissaient bien). L'historien de l'art Kris, qui s'est formé à la psychanalyse, comparait, lui, ces bandelettes à une symbolique ceinture de chasteté : Messerschmidt avait en effet déclaré à Nicolai être complètement chaste. Quant au-dit Nicolai, frappé lui aussi par la façon dont les lèvres des personnages étaient représentées, voici ce qu'il a rapporté par écrit sur ce sujet :
"Etant donné cependant  que la plupart d'entre elles semblent en proie à des convulsions si étranges et ont des lèvres imperceptibles tant elles sont pincées, je serais aujourd'hui encore très embarrassé s'il me fallait dans une certaine mesure deviner ce qui a motivé ce genre d'outrances, si ce que Messerschmidt considérait comme une règle fondamentale et m'avait confié au cours d'une conversation ne m'avait fait entrevoir la méthode sous-tendant sa folie. Il disait en effet : l'homme doit rentrer le rouge de ses lèvres parce qu'aucun animal ne le montre. Quelle étrange raison ! Je lui fis remarquer qu'un homme n'était pas un animal ; il avait cependant une réponse toute prête. Il me dit que les animaux ont de gros avantages sur les hommes ; qu'ils peuvent discerner et ressentir dans la nature beaucoup de choses qui demeurent cachées à l'homme. Quand quelqu'un  veut défendre des sottises, il a recours à n'importe quel sophisme, aussi bête soit-il. Le fait que les animaux ont le plus souvent des sens plus développés et sentent grâce à une ouïe et un odorat plus fin des choses que l'homme ne sent pas, était une explication qui, pour le bon M., était bien trop simpliste. Parce que son cerveau était plein d'idées étranges sur les esprits, parce que, comme beaucoup de gens ayant un faible pouvoir de discernement, il croyait devoir imputer tout effet inconnu à l'action  d'un esprit (causa occulta), il se figurait que les animaux pouvaient mieux que les hommes discerner les esprits et cherchait à l'expliquer - Dieu sait par quelle bizarre association d'idées - par l'absence de lèvres apparentes chez les animaux."


Les délires sculptés de Messerchmidt valant bien ses délires verbaux, malaise garanti devant cette étonnante (et, en quelque sorte, assez malsaine,  puisque normalement réservée au privé), réunion de bustes sculptés. A voir, car peu commun et saisissant ! Et c'est un sujet fascinant pour les psychanalystes en herbe, ou ceux plus expérimentés.


Exposition Franz Xaver Messerchmidt,
du 28 janvier au 25 avril 2011
au musée du Louvre



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